Les chiffres du mois de mai sont tombés. Constat: le taux de chômage des 16-24 ans était de 20,8 %, soit une augmentation de 0,4 point de pourcentage par rapport au mois précédent. A titre de comparaison, il est de 16.4% en Europe et 15% dans la zone Asie-Pacifique.
[vc_empty_space height= »16px »][thb_title style= »style6″ title= »L’économie chinoise en berne, les jeunes chinois peu rassurés »][vc_column_text animation= »animation top-to-bottom »]Interrogé par le quotidien [联合早报 Lianhe Zaobao], l’étudiant de Shanghai Jiang Wenxin livre un témoignage édifiant.
« Les frais de scolarité en musique sont trop chers et la famille n’a aucune condition pour soutenir les études supérieures. L’industrie de l’éducation et de la formation a des barrières à l’entrée élevées dans les grandes villes, et les petites villes ont de faibles des salaires et pas de perspectives de développement (…); L’environnement actuel n’est pas bon, et il est vraiment difficile de trouver un emploi« .
Dans un environnement d’emploi morose aussi bien pour les étudiants (petits boulots) que pour les jeunes diplômés, plusieurs promotions se font concurrence. Depuis 2020, le marché de l’emploi est anémié par la crise sanitaire. Avec le retour à la normale, pas moins de trois promotions s’entredéchirent pour les places restantes. Pour ne rien arranger, cette saison 2023 est une année record en termes de diplomations: 1,58 millions de nouveaux diplômé entrent sur le marché.
[vc_empty_space height= »16px »][thb_title style= »style6″ title= »Universités différentes, enseignement déconnecté »][vc_column_text animation= »animation top-to-bottom »]La concurrence est loin d’être égalitaire. En Chine, on distingue trois niveaux d’Université. Les campus du « Projet 985 » [985工程] présentent ainsi les 39 meilleures universités de Chine. Suivent les 115 suivantes, dite du « Projet 211« . Puis le reste. Et les recruteurs, fort d’un contexte plus que favorable, peuvent se permettre de puiser allègrement parmi les diplômés des Universités les plus prestigieuses.
Pour Zhang Tianqi, journaliste à plusieurs médias chinois comme Caixin ou Aisixiang, « chaque année devient pire que la précédente, depuis 20 ans » [Redian]. Mais depuis 2019, l’accélération du non emploi des jeunes diplômé crève le plafond. « On est passé de 11% en 2019, à presque le double aujourd’hui !« . Et pour cause, un problème économique structurel. Entre 2000 et 2023, le nombre de nouveaux diplômés a été multiplié par 10 et les opportunités d’emploi peinent à suivre.
Mais le contenu des enseignements est aussi en cause. Selon Li Xiaoguang, professeur agrégé au Département de sociologie de l’Université Xi’an Jiaotong, l’enseignement chinois est tout simplement déconnecté du marché de l’emploi. A l’époque ou l’enseignement était réservé à une élite (jusqu’à 2002 selon lui), le diplôme revenait à faire montre de son statut social. L’expansion de la diffusion du savoir académique a changé la donne. On s’intéresse désormais au contenu des cours, leur apport potentiel à l’entreprise. Et l’inadéquation criante entre les deux grève lourdement nombre de jeunes diplômés.
Par ailleurs, le marché du travail est incapable d’absorber ces nouveaux diplômés au niveau de leur compétence. C’est l’apport de l’enquête par sondage de l’Institut de recherche Mycos en 2015 [2015年麦可思研究院]. La majorité des jeunes recrutés chinois sont insatisfaits du niveau de qualification requis par leur travail.
En plus de ces phénomènes, les jeunes diplômés chinois ont tendance à être de plus en plus sélectifs à l’égard de leurs premiers travails, et fuient certains secteurs. C’est le cas, notamment, du BTP.
L’enquête « 2022 Employability Survey Report of College Students » publié par Zhaopin.com, le célèbre site de recrutement, le démontre. En odeur de sainteté ils y a encore une décennie, le secteur du BTP attire désormais moins de 10% des jeunes diplômés. La difficulté physique du travail, les risques financiers du secteur, les horaires éprouvant repoussent désormais les chinois nés après les années 90 [enquête du ], pour qui le travail idéal tend à se rapprocher de ceux imaginés par leurs homologues occidentaux.
[vc_empty_space height= »16px »][thb_title style= »style6″ title= »L’Etat cherche à réagir comme il peut »][vc_column_text animation= »animation top-to-bottom »]On voit se multiplier les initiatives provinciales pour aider les jeunes diplômés à trouver du travail. Il y a 4 jours, le ministère de l’Education vient de lancer une initiative sobrement intitulée « Internet + Emploi » [互联网+就业] invitant les jeunes à chercher leur travail sur le Cloud. 15 000 recruteurs ont été invités sur cette forme de Pole Emploi pour jeunes. Plusieurs Universités s’y sont associées – mais l’initiative fait peu de bruit, et soulève un espoir plus que modéré.
Car les problèmes liés à l’emploi sont profonds. Plusieurs tendances sociales limitent en effet les initiatives à la Pole Emploi cherchant à connecter les demandeurs aux employeurs, sans souci des questions de mobilité. Un témoignage sur le précieux site « Huxiu » en fait état sans ambages: « Il est difficile pour les jeunes de retourner à la campagne pour trouver un emploi après avoir migré vers les villes pour étudier« . La pauvreté de la qualité de vie à la campagne, et le sentiment d’échec brident les tentatives de pousser ces jeunes à la mobilité.
Pendant un temps, ces étudiants migrants des grandes villes, incapables de trouver un emploi, ont intéressé les chercheurs qui ont surnommé cette population de « peuple des fourmis » [蚁族]. De jeunes vagabonds errants à Pékin, locataires de studios minables malgré leurs bardées de diplômes. Certains quartiers de Pékin sont historiquement des lieux de rassemblement de ces « fourmis », à l’image de Xiaojiahe [肖家河] dans les années 2010. Puis, le thème est tombé en désuétude, alors même que ce problème n’a jamais été si grand en Chine.
Noé HIRSCH
