Le 30 décembre, le Comité permanent a confirmé Qin Gang à son nouveau poste: ministre des Affaires étrangères. Il succède au truculent & turbulent Wang Yi (王毅), qui part après 10 années de bon et loyaux services. Et la tâche est ardue. Le prédécesseur de Qin Gang a su donner pleine et entière satisfaction à Xi Jinping. Il est passé au travers des critiques, n’est lié à aucun groupe sous le coup d’enquête disciplinaire, et exécutait avec brio les tours de passe-passe diplomatiques voulus par Pékin. Est-ce que Qin Gang sera à la hauteur?
Pour le savoir, intéressons nous au personnage.
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Qin Gang est né à Tianjin [天津] en 1966, l’année du lancement de la grande campagne de Révolution Culturelle par Mao (1966-1976). Dans son enfance, il découvre donc une ville au patrimoine riche (influences russes et françaises), mais à l’abandon, sans cesse polluée par les usines installées au centre. Qin Gang serait le descendant de Qin Bangxian, dit Bo Gu, dirigeant de fait du Parti communiste chinois de 1931 à 1935. Un fidèle de Mao, qui ne cachait cependant pas ses divergences de vue avec lui, et mort dans un accident d’avion suspect en 1946.
Il entre à l’Université en 1984, à 18 ans. Autrement dit, Qin Gang fait partie des premiers à suivre un cursus « normal » sans passer par la rééducation. Son département: Politique internationale. Diplômé, il intègre directement le ministère des Affaires étrangères et monte rapidement les échelons. Sa première apparition publique remonte à 2005. Il anime une conférence de presse comme porte-parole du Ministère des affaires étrangères.

En septembre 2010, il est promu consul au Royaume-Uni, un poste stratégique qui indique toute la confiance que le gouvernement lui porte. Il passe ensuite dans les affaires diplomatiques latino-américaines, et se retrouve promu vice-ministre des Affaires étrangères en 2018, alors que Xi Jinping renouvelle la machine diplomatique pour y placer ses affidés. Il devient alors le plus jeune vice-ministre du gouvernement.
Un an plus tard, il passe en charge des affaires européennes, puis, en 2021, il passe ambassadeur de Chine aux Etats-Unis. Avant de terminer ministre.
[thb_title style= »style6″ title= »Un officiel charismatique qui ne mâche pas ses mots »][vc_empty_space height= »18px »]
Qu’attendre de Qin Gang?
Les premiers échos de sa personnalité sont positifs. Porte-parole, il serre la main de tous les journalistes étrangers après chaque séance. Une reporter chinoise dit de lui qu’il a « une main de fer dans un gant de velours » (Chinanews, 2010). En quelques années, Qin Gang a prit de l’assurance, répondant directement aux journalistes et capables de belles piques pour « leur mettre la pression« , selon la même reporter. Notamment lors de la crise tibétaine de 2008.
Wang Qin a du charisme. Interrogée, une femme membre de la Fédération panchinoise de la jeunesse déclare: « il a de nombreux fans, parce qu’il est clair dans ses explications, et beau comme un Dieu« (南方周末, 2010). Sa liberté de ton fait la fierté de ses alumni, selon les rapports.

Bien que le média conservateur américain « National Review » ait révélé que Qin Gang outrepasse parfois le ton diplomatique de rigueur dans certaines réunions internationales à huis clos, le nouveau ministre chinois reste plus réservé qu’un grand nombre d’ambassadeurs chinois. Il ne s’est manifestement pas jeté à corps perdu dans la politique de « loup guerriers » qui a animé un temps le corps diplomatique de la Chine. Néanmoins, Qin Gang affirme son attachement à son pays à plusieurs reprises, sans équivoque.
- Sur le plan culturel, en 2007, il engage les USA à s’emparer des « Quatre Livres et Cinq Classiques » (confucianisme), conseillant de s’en inspirer en matière de » droiture, culture de soi, harmonie familiale, gouvernance de l’État et paix mondiale« .
- En 2009, lors d’une conférence de presse, il défend sans nuance la politique de surveillance de masse d’internet en Chine.
- En janvier 2022, Qin Gang affirme que Taïwan pourrait bien devenir un champ de guerre entre la Chine et les USA, comparant l’île à une « poudrière« .
- Vis-à-vis de l’Afrique, il estime que la présence chinoise sur le continent doit accélérer, et privilégier toujours la coopération locale avec les autres grande puissances (14 décembre 2022).
En 2014, lors de l’invasion de la Crimée par la Russie, c’est Qin Gang qui expose la position de la Chine, qui consiste alors à bloquer le conseil de sécurité, à reconnaître le caractère « complexe » de la crise et à promouvoir des « règlements politiques » abstraits au milieu d’une invasion militaire (2014-03-17).
Selon la plupart des observateurs, Qin Gang est l’homme lige de Xi Jinping. De nombreux instantanés de camaraderie entre les deux hommes ont filtré, notamment en 2016, lors le sommet du G20 à Hangzhou. Qin Gang semblait alors en charge de l’agenda du président. Manifestement, Qin Gang partage la ligne géopolitique du président.
Fort de ses ancêtres illustres, efficace, expérimenté (plus de 30 ans de carrière diplomatique), il apparaît en effet comme un bon candidat à la succession de Wang Yi dans le nouveau système mis en place par Xi Jinping.