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PARPCC #3 Avec Xi, la sécurité détrône l’économie – et on le ressent jusqu’ici

PARPCC #3 Avec Xi, la sécurité détrône l’économie – et on le ressent jusqu’ici

Panda, Alcool de Riz et PCC

Panda, Alcool de Riz et PCC est une colonne de Camille Brugier, visant à introduire des articles scientifiques à une audience plus large. Ses publications sont à retrouver sur son fil Twitter.

« Sécurité » – ce mot n’étonne personne quand on parle de la Chine. Pourtant, depuis Deng Xiaoping les dirigeants chinois lui ont préféré un autre mot, celui du développement – ou de l’économie, pour parler plus simplement. Avec Xi, la sécurité a gagné du terrain.

Avec Xi, la sécurité détrône l’économie – et on le ressent jusqu’ici

Tout a commencé avec un discours de Xi de 2014 dans lequel il a présenté le nouveau concept de « sécurité nationale », suivi d’âpres discussions au sein du PCC. En effet, contrairement à ce qu’on l’on dit souvent à propos des régimes autoritaires avec un pouvoir très personnalisé, Xi ne décide pas seul. Par exemple, cette analyse montre que les provinces et les entreprises d’Etat sont aussi des acteurs importants de la politique étrangère chinoise ; cet ouvrage parle du pouvoir des provinces dans la mise en œuvre (ou non) de politiques décidées par le Parti.

D’un point de vue général, c’est au sein du PCC que se négocient les grandes orientations, et la priorité entre les politiques. Le déclic en faveur de Xi est venu de l’étranger et des tensions grandissantes avec les Etats-Unis. Dès 2017, on a vu le nouveau « nexus » sécurité-développement fleurir dans les documents officiels. En 2021, fait marquant, le 14e plan quinquennal a laissé tomber la référence à la priorité absolue du développement.

Ce remaniement des priorités a aussi un impact sur la politique étrangère : la Chine serait aujourd’hui davantage prête à prendre des risques. Elle accepterait par exemple de subir les conséquences économiques d’actions visant à assurer sa « sécurité », alors que cela constituait une ligne rouge par le passé. On a vu cette nouvelle orientation à l’œuvre avec les « loups guerriers », ou dans les actions plus agressives menées par la Chine dans sa région proche (à la frontière avec l’Inde, en mer de Chine, etc).

Pour cet article, Howard Wang examine ce que disent les documents officiels, et en particulier les plus importants comme les rapports de travail des congrès du PCC, les plans quinquennaux ou les communiqués officiels suivant les plénières. Ce type d’analyse de document est une manière indirecte d’étudier des régimes peu transparents. Le travail de Wang tombe à pic car nous sommes à un moment-charnière de fermeture de la Chine qui impacte le travail des chercheur.ses.

La sécurité nationale chinoise, le sujet de l’article, permet à la Chine de justifier l’accès limité des étrangers aux sources originales chinoises. C’est le cas des statistiques, qui permettaient de faire des analyses intéressantes comme celle-ci sur le budget de la Chine consacré à sa diplomatie. Cela concerne également l’accès aux travaux des chercheur.se.s chinois.e.s. Ces deux types de sources étaient accessibles sur la base de données chinoise CNKI (l’équivalent de nos JSTOR ou CAIRN). Or, depuis début avril 2023, cette base de données n’est plus accessible en dehors de Chine.

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Ces sources sont pourtant importantes : croisées avec d’autres informations (du même corpus ou non), elles permettent de comprendre ce qui fait débat en Chine. Plus surprenant encore, les expert.e.s chinois.e.s, pensant parler entre collègues, mentionnent parfois dans leurs articles des choses « confidentielles ». On a ainsi vu certains documents « fuiter » (organigrammes, débats internes, etc.) et permettre par exemple de révéler au grand jour l’existence de cellules spécifiques de l’armée chinoise (la fameuse base 311).

Pour ces raisons de sécurité invoquées par la Chine, il est de plus en plus difficile de faire de la recherche de qualité en sources ouvertes sur le pays. C’est pour cela que l’article de Wang est intéressant : pour le sujet qu’il traite, et parce qu’il est un sujet en lui-même.

Référence: Howard Wang (2022): “Security Is a Prerequisite for Development’: Consensus-Building toward a New Top Priority in the Chinese Communist Party”, Journal of Contemporary China, August 2022.

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