Personnage loyal et taiseux, qui ne donne jamais d’interview, Wang Huning est devenu l’idéologue de Xi Jinping. La presse donne peu de détail sur sa vie, sa formation, le processus qui lui a fait germer l’idée de renaissance de la nation chinoise et de rêve chinois. Plongeons ensemble dans les méandres de ce penseur malingre que les chinois ont appris à connaître.
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Wang Huning est né à Shanghai le 6 octobre 1955, dans une famille de cadre. Le père de Huning, qui a participé à la campagne de Mao contre le Maréchal Peng Dehuai, est persécuté durant la révolution culturelle, à partir de 1966.
A 17 ans, Wang Huning est recommandé comme « étudiant ouvrier, paysan ou soldat » à l’Université normale de Shanghai pour apprendre le français. Il n’est pourtant pas allé « s’éduquer à la campagne » en raison de sa santé fragile. Une fois diplômé, il travaille comme chercheur à la branche shanghaïenne de l’Académie des sciences sociales de Shanghai, avant de passer en maîtrise à l’université de Fudan. A cette occasion, il rencontre son premier tuteur, Wang Bangzuo [王邦佐], qui dirige le département de politique internationale de cette université.
Alors, qui est Wang Bangzuo, le premier maître à penser de Wang Huning?
Wang Bangzuo semble être un marxiste pur et dur, très apprécié de l’officialité chinoise, et connu pour ses travaux sur « la structure du système marxiste ». Il a notamment travaillé, en parallèle, sur le système bipartite américain et l’histoire du Front Uni du PCC. C’est surtout l’architecte de la planification du développement quinquennal des sciences politiques chinoises du pays depuis le « sixième plan quinquennal ». A son contact, Wang Huning va commencer à structurer sa pensée, celle-là même qu’on retrouve aujourd’hui dans la bouche de Xi Jinping.
Alors qu’il travaille à l’Université de Fudan, Wang Huning commence sa carrière politique comme agent de la Sécurité d’Etat, selon le magazine Hong-kongais « Open » [開放雜誌]. En effet, le département de sciences politiques de l’université Fudan, où Wang Huaning travaillait, était associée au ministère de la sécurité; les enseignants et les universitaires y avaient le statut d’agents du ministère de la sécurité d’État. Wang Huning doit surveiller les contacts universitaires entre l’université Fudan et les Occidentaux.
En 1988, Wang Huning est invité à travailler comme chercheur invité au Département de science politique de l’ Université de l’Iowa et le Département de science politique de l’Université de Californie à Berkeley pendant six mois. En Chine, le PCC remarque ce penseur vif et rapide, si bien que le média officiel Banyuetan [半月谈] en fait sa Une dès les années 80.
A cette époque, Wang Huning commence la rédaction d’un « journal politique » qui sera publié en 1995. Ce livre, qu’on ne trouve aujourd’hui que chez certains brocanteurs et antiquaires, esquisse les concepts qu’il développera pour former en dernière instance le cœur du programme politique de Xi Jinping.
On peut y lire: « Le progrès et les contradictions de la société sont souvent le résultat de l’effet combiné de diverses tentations auxquelles les gens sont soumis. A l’époque moderne, la plus grande tentation est la tentation de la « politique démocratique ». Par conséquent, dans le processus de développement social, il est important de promouvoir le développement de la politique démocratique et de libérer les gens de ces tentations, qu’elles soient positives ou négatives, car c’est une condition importante de la stabilité sociale« .
- Cette pensée, on la retrouve dans le concept de démocratie populaire et consultative chez Xi Jinping. Il faut détourner les gens du rêve démocratique en détournant le sens du mot.
Wang Huning devient aussi le premier penseur chinois à prendre le concept de « Soft Power » de Joseph Nye à bras le corps. C’est en vertu de ce penseur qu’il invente « le Rêve chinois« .
Revenons au fil de la vie de Wang Huning.
[/vc_column_text][vc_empty_space height= »18px »][thb_title style= »style6″ title= »Wang Huning est obsédé par la puissance américaine »][vc_empty_space height= »18px »][vc_column_text]
De retour de son voyage aux Etats-Unis, Wang Huning est perturbé. Il prend pleine conscience de la puissance du pays et s’attelle à dénicher les failles de son système pour mieux promouvoir un régime alternatif. Dès 1991, il signe « L’Amérique contre l’Amérique » [美国反对美国]. La contradiction de Wang Huning est la suivante: « comment un pays aussi déchiré peut accomplir des choses aussi grandes?« . Le livre entier est disponible sur GitHub. Pour Wang Huning, les Américains ne sont pas devenus si puissant « par hasard », comme le pensent, selon lui, les Européens. Mais les Américains traversent une importante « crise spirituelle » [精神危机]. Wang observe l’effritement des valeurs traditionnelles et l’effondrement de l’ancien système de valeur handicape le développement et la stabilité sociale des Etats-Unis. Dont acte.
[/vc_column_text][vc_empty_space height= »18px »][thb_title style= »style6″ title= »Wang Huning, architecte des concepts politiques de Jiang, Hu, et enfin, Xi. »][vc_empty_space height= »18px »][vc_column_text]
En 1995, Wang Huning a 40 ans, une belle carrière de chercheur, et commence à diriger ses premières thèses. Remarqué par Zeng Qinghong, proche de Jiang Zemin, il est alors appelé à Pékin par ce dernier. Wang Huning est catapulté « assistant spécial » au Comité central du PCC. Sa mission: épauler le nouvel arsenal de théories du président. En octobre 2002, il succède à Teng Wensheng à la direction du Bureau central de recherche sur les politiques; il en profite pour se faire nommer membre du Comité central du PCC.
Wang Huning participe alors aux principaux concepts idéologiques des dirigeants successifs du PCC: « Les trois représentations » de Jiang Zemin, et les « Perspectives scientifiques sur le développement » de Hu Jintao. Il adhère à l’école de pensée de la New Authoritarianism school (新权威主义), alors que le débat sur l’orientation politique de la Chine fait rage, à partir de 1988. Cette école justifie la nécessite d’une « gouvernance experte » et d’une concentration du pouvoir pour promouvoir le progrès économique, prenant notamment exemple sur les Dragons d’Asie (en particulier Singapour).
Le 22 octobre 2007, Wang Huning, 52 ans, est élu secrétaire du Comité central du Parti communiste chinois.
Pour Wang Huning, pour assurer la stabilité de la société chinoise, il y a 4 tenants à maîtriser, et le reste doit suivre:
- L’armée
- Les partis politiques
- Les cadres du Parti
- Les intellectuels
Dans le texte: [中國社會會不會亂？要注意四大系統：軍隊、政黨、幹部和知識份子。只要這四個系統不發生問題。中國就能穩定發展]。Inutile de préciser que Xi Jinping prendra bonne note.
En 2012, il entre au Bureau politique du Comité central du PCC. Xi Jinping le charge de travailler à son programme politique. Wang Huning gagne des prérogatives de plus en plus importantes sous le règne de Xi. C’est lui qui lui insuffle les thèmes de « Nouvelle Ere », de « Rêve chinois », ou même « les nouvelles routes de la Soie ». Il crée les mots d’ordre et slogans si caractéristiques de l’ère de Xi Jinping, comme le fameux « N’oubliez pas l’intention première« .
Wang avertit Xi Jinping sur les problèmes de la corruption et la nécessité de dresser les cadres du Parti. Il avait créé un concept dans les 90′, « la super-corruption » [超腐败], où les corrupteurs agissent de concert avec les pouvoirs publics et se forment en groupes d’intérêt.
Wang va contrôler, via divers comités, de vastes secteurs de la société, notamment l’éducation, la cybersécurité et la réforme juridique.
L’expérience montre qu’il a l’oreille attentive du président.
En 2017, Wang passe au politburo, et y reste en 2022.[/vc_column_text][vc_empty_space height= »18px »][/vc_column][vc_column][/vc_column][/vc_row]
