Les ruraux qui viennent à la ville vivre de petits boulots, ou sur les chantiers à la journée, se retrouvent rapidement sous le joug de cette règle traditionnelle chinoise quand ils s’entichent d’une femme issue d’une famille urbaine. Xiao Yan [小严] travaillait comme ouvrier d’atelier dans une usine de chaussures du Guangdong, pour 4 000 yuans par mois. Amoureux d’une fille du Hunan dans la vente, il s’est rapidement trouvé en défaut vis-à-vis de cette obligation traditionnelle.
Malgré les attentions de sa dulcinée, Xiao Yan se « sentait mal à l’aise ». C’est finalement la famille de cette dernière qui a fait pression pour mettre un terme à leur histoire [Témoignage recueilli dans « Men Compromise: Urban-Rural Migration, Family and Gender in China« ].

Selon les normes chinoises actuelles en matière de mariage, les hommes sont censés surpasser (ou au moins égaler) leurs épouses en termes d’éducation et de revenu de carrière, et les hommes et leurs familles sont censés fournir un logement aux jeunes mariés. Xiao Yan est une des victimes de cette règle.
[/vc_column_text][vc_empty_space height= »18px »][thb_title style= »style6″ title= »Règle n°2 : l’homme épouse une femme du même pays »][vc_empty_space height= »18px »][vc_column_text]Les ruraux comptent sur le soutien de leur famille pour acheter la maison en dot pour le mariage. Or, en vertu des traditions rurales, les familles exigent souvent de leurs enfants qu’ils prennent pour épouse une femme du même village, de la même région. C’est le coup fatal pour les ruraux tombés amoureux d’urbaines, pour ceux qui parviennent à se faire accepter, car dans le jeu du marché des rencontres en ville, cette population sera toujours la plus défavorisée [Etude des chercheuses 蔡玉萍 et 彭铟旎 sur les années 2012-2015] [/vc_column_text][vc_empty_space height= »18px »][thb_title style= »style6″ title= »Règle n°3: donner une éducation correcte à ses enfants »][vc_empty_space height= »18px »][vc_column_text]
Les hommes migrants des villes, dont les enfants sont restés à la campagne, se voient confrontés à la qualité supérieure de l’éducation urbaine. Leur rôle de père les oblige à donner le meilleur à leur enfants méritants, qui se voient cantonnés à l’éducation de la ruralité (médiocre) et l’impossibilité financière de leur payer une éducation privée digne de ce nom. Lao Ai, un chauffeur de taxi du Guangdong, a été écouté par les deux chercheuses :
« Je n’ai pas l’argent pour leur acheter une maison en ville, je ne peux pas leur donner plus d’argent de poche, je ne sais pas comment les aider à faire leurs devoirs (…). J’ai l’impression de retarder mes enfants, ils sont tous intelligents et ils apprennent tous bien. Si je pouvais leur donner plus, à quoi ressembleraient-ils maintenant ? Je ne peux pas dormir la nuit quand je pense à ces choses ».
[/vc_column_text][vc_empty_space height= »16px »][thb_title style= »style6″ title= »La masculinité est redéfinie dans la douleur. « ][vc_empty_space height= »16px »][vc_column_text]80 % des travailleurs migrants estiment que le soutien à la famille est la caractéristique principale de la « masculinité ». Cependant, dans le nouvel agencement de la société, où les femmes vont de plus en plus travailler et où les conjointes urbaines gagnent souvent mieux leur vie que leurs époux d’origine rurale, cette règle tend à se nuancer. Par exemple, sur la question des tâches ménagères, la tradition veut que « les hommes sont dehors, les femmes dedans » [男主外女主内].

Pour maintenir leur obligation de soutenir le foyer, les travailleurs migrants s’occupent de plus en plus des tâches ménagères et d’intérieur. Selon 蔡玉萍 et 彭铟旎, 44% des travailleurs migrants interrogés s’occupent des tâches d’intérieur, ce qui constitue une vraie révolution du foyer chinois traditionnel. Même si de nombreux témoignages font état de la difficulté de s’acquitter de ces tâches dans les villages, où la pression sociale est forte.
« Grand-mère esclave » [老婆奴]
C’est le sobriquet utilisé contre les hommes qui s’occupent de laver les vêtements et de préparer à manger, dans la ruralité. Pour mettre en adéquation ces tâches « dégradantes » et la masculinité traditionnelle, les travailleurs migrants font évoluer le terme vers la notion de « travail honnête » et la « loyauté ». Etre un Homme, ce n’est plus gagner plus, c’est se dévouer à la vie du foyer de toutes les manières possibles, en restant intègre.
[/vc_column_text][vc_empty_space height= »16px »][thb_title style= »style6″ title= »Pas que des progrès: la question de la violence »][vc_empty_space height= »16px »][vc_column_text]Bien sûr, tous n’adhèrent pas à une recherche du « compromis » dans leur masculinité. Beaucoup de travailleurs migrants préfèrent vivre dans des dortoirs plutôt que de rentrer chez eux, par dégoût des obligations ménagères. D’autres, incapable d’accéder à la richesse et au succès, préfèrent user de la violence conjugal pour asseoir leur masculinité.
Xiao Su, un ouvrier de 34 ans, admet dans une interview que sa femme gagne plus que lui, et qu’il n’hésitait pas à la frapper quand le sujet était mis sur la table à la maison. Ce revenu plus élevé donnait des droits à sa femme, ce qui menaçait sa position dans le foyer. Ici la violence lui permettait de se rétablir en haut de la hiérarchie.
L’évolution des moeurs est un processus long et douloureux, au sein de cette société rurale. Ce qui est certain: le patriarcat rural, s’il pousse d’innombrables femmes à s’exiler en ville pour fuit ce carcan social, pèse également sur les hommes mis en compétition avec les urbains qu’ils ne pourront jamais égaler.
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